Citadelle… - Alphonse Capon

VII

 

Citadelle formant croix d’honneur. – Pentagone ;

Ouvrage de Vauban défendu par Boufflers.

Voyant, là-bas, le turf, vert pré fleuri de jaune,

Qui donc songe à l’ancien champ de course de Flers !

 

Courses sur la pelouse, en fleurs, d’une pâture ;

Or, c’était, ce jour-là grande fête au pays,

Mille gens s’y rendaient à pied, mille en voiture,

Abords envahis par des bourgeois ébahis.

 

Les curieux allaient admirer les toilettes,

S’extasiaient devant les couleurs des jockeys,

Des marchands ambulants y vendaient des galettes,

Le champagne moussait dans les verres choqués.

 

Galops de chevaux, cris, hurrah ! et sauts de herse,

L’air, la joie et le vin rendaient le teint vermeil ;

Un orage, parfois, vous arrosait à « verse » ;

Souvent, on revenait cuit d’un coup de soleil !

 

Publié en 1924 dans le recueil Poèmes du Nord. Sites et Cités (Paris, Taillandier).

Portrait d'Alphonse CaponAlphonse Capon a le talent de transformer un lieu chargé d’histoire en un décor vibrant de vie et d’émotions. Dans Citadelle…, il évoque ce bastion de Lille, autrefois symbole de défense, devenu un espace de fêtes et de rassemblements populaires. Sous sa plume, les champs de bataille cèdent la place aux champs de courses, et l’histoire militaire s’efface devant l’animation joyeuse des courses hippiques, des éclats de rire et du champagne qui pétille. Son écriture capte cette dualité typique de Lille : une ville fière de son passé, mais résolument tournée vers la convivialité et le plaisir de vivre. Avec un œil malicieux et une grande sensibilité, Capon célèbre cette chaleur humaine qui fait l’identité du Nord, où l’on partage autant les orages que les coups de soleil. Un poète du quotidien, qui sait révéler la poésie là où bat le cœur de la ville.

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