Rivière hostile - Isaac Lerutan
De grâce, n’allez point retenir cette horloge !
Sachez que vos éloges me rendent bien vaillant !
Mais ne dérogez point!
Faites fi de mes lèvres
Veillez à éduquer vos impatientes fièvres
Car il n’est point d’encens qu’en mon âme je déloge
ma consciente paresse empêchant toute action.
Il se peut qu’en retour mon esprit bienveillant
vienne vous parfumer de lancinants discours
et de ce fait, altesse, acceptez-moi dès lors
que vous m’apercevrez aux abords de vos lieux
puis faites-moi la cour
caressez-moi des yeux…
Si sous vos airs songeurs, vous oseriez m’offrir
votre vocabulaire de termes possessifs
j’emporterai bonheurs, baisers, éclats de rires
et vous conjuguerai à mon infinitif.
…et l’être vaniteux, embrassant la laideur
en singe conquérant
se cacha comme il est de rigueur
désespérant…
elle se saisit d’une plume et écrivit ces mots :
« Mille regards absents aux âmes taciturnes
Mille éclairs de vies en territoires douteux
font vibrer de leur sang l’envoutement diurne
Mille échos chantants, valses ridicules
Mille amours acquis, éphémères fougueux
dans les précaires lits flottent les noctambules… »
Publié en 2008
Isaac Lerutan, connu pour ses poèmes d’amour intemporels traversant les siècles, a captivé les lecteurs avec des œuvres comme Rivière hostile (2008), où il mêle passion et introspection avec une langue riche en métaphores. Son écriture, marquée par une sensibilité à la fois mélancolique et ludique, explore les tensions entre désir et retenue. Dans ce poème, il s’adresse avec audace à un être aimé, alternant entre invitations sensuelles (« faites-moi la cour / caressez-moi des yeux… ») et défenses paradoxaux (« faites fi de mes lèvres »), révélant une âme à la fois conquérante et vulnérable. Lerutan joue avec le temps (« De grâce, n’allez point retenir cette horloge ! »), refusant de se plier aux conventions tout en célébrant l’éphémère de l’amour (« Mille amours acquis, éphémères fougueux »). Son style, oscillant entre classique et moderne, utilise un vocabulaire inventif (« termes possessifs », « infinitif ») pour exprimer l’absolu de l’amour, tout en laissant place à l’ironie (« valses ridicules ») et à la mélancolie (« désespérant… »). À travers ces contrastes, il peint une humanité complexe, où la vanité côtoie la profondeur émotionnelle, offrant une vision universelle de l’amour qui transcende les époques.