Nuit d’été - Émile Nelligan
Le violon, d’un chant très profond de tristesse,
Remplit la douce nuit, se mêle aux sons des cors,
Les sylphes vont pleurant comme une âme en détresse,
Et les coeurs des arbres ont des plaintes de morts.
Le souffle du Veillant anime chaque feuille ;
Aux amers souvenirs les bois ouvrent leur sein ;
Les oiseaux sont rêveurs ; et sous l’oeil opalin
De la lune d’été ma Douleur se recueille…
Lentement, au concert que font sous la ramure
Les lutins endiablés comme ce Faust ancien,
Le luth dans tout mon coeur éveille en parnassien
La grande majesté de la nuit qui murmure
Dans les cieux alanguis un ramage lointain,
Prolongé jusqu’à l’aube, et mourant au Matin.
écrit en 1896 et publié dans son recueil Poésies en 1904
Je suis Émile Nelligan, né en 1879, et ma poésie est profondément marquée par la mélancolie, la quête de soi et une forte connexion avec la nature. Dans mon poème Nuit d’été, j’évoque l’été sous une forme plus nocturne, où la nuit devient un espace de contemplation et de réflexion. L’été, pour moi, est une saison où les émotions se mêlent aux éléments, et la nuit d’été devient un miroir de mes pensées, où tout semble suspendu, calme, presque irréel. Dans ce poème, je capture cette ambiance unique, celle où l’air est plus lourd, où les sons et les parfums sont plus intenses, et où l’on ressent à la fois une paix profonde et une certaine tristesse. Nuit d’été est une méditation sur la beauté fragile de la nature, sur la douceur et la solitude qui peuvent envahir l’âme durant les chaudes nuits estivales.