Sur la Grand’Place… - Alphonse Capon
IV
Sur la Grand’Place, à Lille, un essaim de pigeons
Becquetant sur le sol, volant sur les pignons,
Perchés sur la Déesse, au haut de la Colonne,
Ils fleuronnent sa couronne.
Ce ne sont, au soleil, que gais ébattements
D’ailes, que chatoiements et que roucoulements ;
Ils planent sur la Bourse et la vieille Grand’Garde,
Des plumes neigent : regarde.
Le Lillois les respecte et leur jette du grain.
Heureux pigeon, sa vie est douce et sans chagrin ;
Il est l’oiseau sacré, comme fut, ma parole,
Jadis l’Oie, au Capitole.
Publié en 1924 dans le recueil Poèmes du Nord. Sites et Cités (Paris, Taillandier).
Alphonse Capon sait capturer l’âme de Lille dans les moindres détails du quotidien. Avec Sur la Grand’Place…, il transforme une scène banale – des pigeons voletant sur la place centrale – en un tableau poétique et vivant. Son regard, à la fois tendre et émerveillé, célèbre cette harmonie entre la ville et ses habitants, entre le patrimoine et la nature urbaine. À travers ces oiseaux qu’il élève presque au rang de symboles, il révèle l’attachement des Lillois à leur environnement et à cette chaleur humaine qui imprègne chaque recoin de la cité. Son style fluide et imagé donne à son poème une légèreté festive, un charme simple mais puissant. Capon est de ces poètes qui savent voir la beauté dans l’ordinaire, transformant la vie quotidienne en une scène pleine de poésie et d’émotion. Un véritable peintre des mots, amoureux de sa ville.