Evadné - René Char
L’été et notre vie étions d’un seul tenant
La campagne mangeait la couleur de ta jupe odorante
Avidité et contrainte s’étaient réconciliées
Le château de Maubec s’enfonçait dans l’argile
Bientôt s’effondrerait le roulis de sa lyre
La violence des plantes nous faisait vaciller
Un corbeau rameur sombre déviant de l’escadre
Sur le muet silex de midi écartelé
Accompagnait notre entente aux mouvements tendres
La faucille partout devait se reposer
Notre rareté commençait un règne
(Le vent insomnieux qui nous ride la paupière
En tournant chaque nuit la page consentie
Veut que chaque part de toi que je retienne
Soit étendue à un pays d’âge affamé et de larmier géant)
C’était au début d’adorables années
La terre nous aimait un peu je me souviens.
publié en 1947 dans son recueil Feuillets d’Hypnos.
Je suis René Char, né en 1907, et ma poésie est un appel à la liberté, à l’intensité de l’existence et à la beauté de l’instant. Dans mon poème Évadné, je parle de l’été d’une manière qui mêle le rêve et la réalité, en explorant les thèmes de l’évasion et de la fuite. L’été, pour moi, est un temps où l’on se libère des contraintes du quotidien, un moment de révolte intérieure et de quête. Dans Évadné, je capture cette sensation de désir irrésistible, de fuite vers l’inconnu, qui est aussi une forme d’abandon à la nature, à la chaleur, à la lumière. J’aime que la poésie soit pour moi une manière d’échapper, d’aller au-delà de ce qui est visible, d’explorer ce qui se cache dans l’intensité d’une saison comme l’été. C’est une invitation à se laisser porter par le vent de la liberté.