Chagrin d’automne - René-François Sully Prudhomme

Les lignes du labour dans les champs en automne

Fatiguent l’œil, qu’à peine un toit fumant distrait,

Et la voûte du ciel tout entière apparaît,

Bornant d’un cercle nu la plaine monotone.

En des âges perdus dont la vieillesse étonne

Là même a dû grandir une vierge forêt,

Où le chant des oiseaux sonore et pur vibrait,

Avec l’hymne qu’au vent le clair feuillage entonne !

Les poètes chagrins redemandent aux bras

Qui font ce plat désert sous des rayons sans voile

La verte nuit des bois que le soleil étoile ;

Ils pleurent, oubliant, dans leurs soupirs ingrats,

Que des mornes sillons sort le pain qui féconde

Leurs cerveaux, dont le rêve est plus beau que le monde !

 

1866 – Les Épreuves

Je suis René-François Sully Prudhomme, né en 1839 à Paris, poète et premier lauréat du prix Nobel de littérature en 1901. D’abord tenté par une carrière scientifique, j’ai rapidement trouvé dans la poésie une vocation qui m’a permis d’exprimer mes réflexions sur la vie, la douleur et la quête de vérité. Mes œuvres, comme Les Solitudes et Les Épreuves, explorent les sentiments humains avec une précision presque scientifique, alliant une grande sensibilité à une rigueur intellectuelle. Mon poème « Chagrin d’automne » est l’un de ceux où j’évoque la mélancolie des saisons et le passage du temps, des thèmes qui m’ont toujours fasciné. Passionné par la philosophie, j’ai voulu que ma poésie touche l’esprit autant que le cœur, et j’espère que mes vers continueront de résonner, apportant un peu de clarté aux âmes en quête de sens.

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