Allégorie - Paul Verlaine
Despotique, pesant, incolore, l’Eté,
Comme un roi fainéant présidant un supplice,
S’étire par l’ardeur blanche du ciel complice
Et bâille. L’homme dort loin du travail quitté.
L’alouette au matin, lasse, n’a pas chanté,
Pas un nuage, pas un souffle, rien qui plisse
Ou ride cet azur implacablement lisse
Où le silence bout dans l’immobilité.
L’âpre engourdissement a gagné les cigales
Et sur leur lit étroit de pierres inégales
Les ruisseaux à moitié taris ne sautent plus.
Une rotation incessante de moires
Lumineuses étend ses flux et ses reflux…
Des guêpes, çà et là, volent, jaunes et noires.
1884, dans le recueil Jadis et naguère
Je suis Paul Verlaine, né en 1844, et ma poésie est une quête d’harmonie et de mélancolie. Dans mon poème Allégorie, je plonge dans l’univers de l’été, cette saison où la nature semble s’étirer dans une lumière brûlante, presque irréelle. L’été pour moi, c’est un moment de tension entre le désir et le déclin, un espace où le monde extérieur reflète l’agitation de mon âme. J’aime peindre ces instants où la chaleur envahit tout, où la lumière devient presque aveuglante, comme un symbole de l’illusion et des rêves perdus. À travers mes vers, je cherche à saisir ce temps suspendu, cet été figé entre la beauté et la fragilité, une allégorie de la vie elle-même. Mon écriture se nourrit de ces sensations subtiles, de ces moments où l’intensité de l’existence éclate sous nos yeux.