A Paris, en été, les soirs sont étouffants… - François Coppée
A Paris, en été, les soirs sont étouffants.
Et moi, noir promeneur qu’évitent les enfants,
Qui fuis la joie et fais, en flânant, bien des lieues,
Je m’en vais, ces jours-là, vers les tristes banlieues.
Je prends quelque ruelle où pousse le gazon
Et dont un mur tournant est le seul horizon.
Je me plais dans ces lieux déserts où le pied sonne,
Où je suis presque sûr de ne croiser personne.
Au-dessus des enclos les tilleuls sentent bon ;
Et sur le plâtre frais sont écrits au charbon
Les noms entrelacés de Victoire et d’Eugène,
Populaire et naïf monument, que ne gêne
Pas du tout le croquis odieux qu’à côté
A tracé gauchement, d’un fusain effronté,
En passant après eux, la débauche impubère.
Et, quand s’allume au loin le premier réverbère,
Je gagne la grand’ rue, où je puis encor voir
Des boutiquiers prenant le frais sur le trottoir,
Tandis que, pour montrer un peu ses formes grasses,
Avec son prétendu leur fille joue aux grâces.
1885, Poèmes divers
Je suis François Coppée, poète des petites gens, des rues et des paysages parisiens. Dans mon poème A Paris, en été, les soirs sont étouffants…, j’explore l’atmosphère des nuits d’été dans la capitale, où la chaleur devient presque tangible, pesante. Paris, la ville que j’aime tant, révèle ici ses aspects plus sombres et solitaires, loin des foules, dans ses ruelles silencieuses et ses banlieues abandonnées. C’est là que je m’épanouis, observant la vie, en quête d’histoires simples, mais chargées de vérité.