Dans le jardin - Stéphane Mallarmé
La jeune dame qui marche sur la pelouse
Devant l’été paré de pommes et d’appas,
Quand des heures Midi comblé jette les douze,
Dans cette plénitude arrêtant ses beaux pas,
A dit un jour, tragique abandonnée – épouse –
A la Mort séduisant son Poëte : « Trépas !
Tu mens. Ô vain climat nul ! je me sais jalouse
Du faux Éden que, triste, il n’habitera pas. »
Voilà pourquoi les fleurs profondes de la terre
L’aiment avec silence et savoir et mystère,
Tandis que dans leur coeur songe le pur pollen :
Et lui, lorsque la brise, ivre de ces délices,
Suspend encore un nom qui ravit les calices,
A voix faible, parfois, appelle bas : Ellen !
écrit en 1869 et publié dans le recueil Poésies en 1899
Je suis Stéphane Mallarmé, né en 1842, et ma poésie est un jeu de symboles, de sensations et de mystères. Dans mon poème Dans le jardin, j’évoque l’été d’une manière subtile, où chaque élément naturel devient un reflet de l’invisible. L’été, pour moi, est une période où le monde se déploie dans sa sensualité, mais aussi dans ses contradictions. Dans ce jardin, les fleurs, l’air chaud, et la lumière sont des métaphores d’un monde intérieur, qui dépasse la simple réalité. Ce poème explore l’idée que la nature, sous la chaleur de l’été, peut être un lieu de réflexion, où le temps semble suspendu, presque irréel. J’aime capturer ces instants de silence où l’on peut percevoir l’infini à travers des détails simples, transformés par la poésie en une expérience esthétique unique.