Été - Paul Valery
À Francis Vielé-Griffin.
Été, roche d’air pur, et toi, ardente ruche,
Ô mer ! Éparpillée en mille mouches sur
Les touffes d’une chair fraîche comme une cruche,
Et jusque dans la bouche où bourdonne l’azur ;
Et toi, maison brûlante, Espace, cher Espace
Tranquille, où l’arbre fume et perd quelques oiseaux,
Où crève infiniment la rumeur de la masse
De la mer, de la marche et des troupes des eaux,
Tonnes d’odeurs, grands ronds par les races heureuses
Sur le golfe qui mange et qui monte au soleil,
Nids purs, écluses d’herbe, ombres des vagues creuses,
Bercez l’enfant ravie en un poreux sommeil !
Dont les jambes (mais l’une est fraîche et se dénoue
De la plus rose), les épaules, le sein dur,
Le bras qui se mélange à l’écumeuse joue
Brillent abandonnés autour du vase obscur
Où filtrent les grands bruits pleins de bêtes puisées
Dans les cages de feuille et les mailles de mer
Par les moulins marins et les huttes rosées
Du jour… Toute la peau dore les treilles d’air.
publié en 1917 dans le recueil Charmes
Je suis Paul Valéry, né en 1871, et ma poésie est une exploration de la pensée, du doute et de la beauté. Dans mon poème Été, j’évoque cette saison avec une intensité presque philosophique, où chaque détail, chaque sensation semble prendre une profondeur particulière. L’été, pour moi, n’est pas simplement un temps de chaleur et de lumière, mais une période où l’esprit, tout comme la nature, semble se déployer, à la fois plein de vie et d’immobilité. Dans ce poème, je capture cette dualité, ce mélange de calme et d’effervescence que l’on ressent sous la chaleur de l’été. J’aime faire ressortir l’idée que l’été est un état de l’esprit, un moment suspendu où l’on peut observer la nature, mais aussi réfléchir sur soi-même. C’est un poème où la clarté de l’été rejoint la profondeur de la réflexion.