Paris. - Paul Verlaine
Paris n’a de beauté qu’en son histoire,
Mais cette histoire est belle tellement !
La Seine est encaissée absurdement,
Mais son vert clair à lui seul vaut la gloire.
Paris n’a de gaîté que son bagout,
Mais ce bagout, encor qu’assez immonde,
Il fait le tour des langages du monde,
Salant un peu ce trop fade ragoût.
Paris n’a de sagesse que le sombre
Flux de son peuple et de ses factions,
Alors qu’il fait des révolutions
Avec l’Ordre embusqué dans la pénombre.
Paris n’a que sa Fille de charmant
Laquelle n’est au prix de l’Exotique
Que torts gentils et vice peu pratique
Et ce quasi désintéressement.
Paris n’a de bonté que sa légère
Ivresse de désir et de plaisir,
Sans rien de trop que le vague désir
De voir son plaisir égayer son frère.
Paris n’a rien de triste et de cruel
Que le poète annuel ou chronique,
Crevant d’ennui sous l’oeil d’une clinique
Non loin du vieil ouvrier fraternel.
Vive Paris quand même et son histoire
Et son bagout et sa Fille, naïf
Produit d’un art pervers et primitif,
Et meure son poète expiatoire !
1893 dans le recueil Poèmes divers
Je suis Paul Verlaine, né en 1844, poète des âmes sensibles et des émotions subtiles. Paris, cette ville vibrante et insaisissable, a toujours été au cœur de mes rêveries et de mes tourments. Dans mon poème Paris, écrit vers la fin de ma vie en 1893, je dresse un portrait émouvant de la capitale, teinté de nostalgie et d’un amour profond pour ses rues animées, ses cafés, et ses mystères. Paris, c’était mon refuge et ma scène, un lieu où je pouvais à la fois m’égarer et me retrouver. Ce poème est une déclaration à une ville qui, malgré ses changements, reste fidèle à son âme : un mélange de lumière et d’ombre, de joie et de mélancolie. À travers mes mots, j’ai voulu capturer cette essence unique de Paris, une ville qui respire l’art, l’amour et la poésie à chaque coin de rue.