Pluie d’Automne - Louisa Siefert
I
Enfin, voici la pluie et les brumes d’automne !
Le temps est presque froid. Le soleil radieux
Depuis hier au soir nous a fait ses adieux ;
Le ciel, d’un bout à l’autre, est d’un gris monotone.
Sous les arbres feuillus l’ombre se pelotonne,
Bleue et tranquille ; un jour aveuglant, odieux
Cesse de l’accabler de traits insidieux ;
Dans l’accord des couleurs pas une ne détonne.
Le regard ébloui de trop vives clartés,
Brûlé par la splendeur des rayonnants étés,
Se détend, se repose et contemple, paisible,
Les arbres estompés, les contours amollis,
Le vallon qui se creuse en mystérieux plis,
Et l’horizon rendu par la pluie invisible.
II
Quand on a l’âme sombre et le cœur angoissé,
Ces aspects adoucis, ces tons mélancoliques,
Que voilent à demi des hachures obliques
(Impalpable réseau d’un faible vent poussé),
Cette nature en deuil, ce feuillage froissé,
Ces teintes d’un vert glauque aux reflets métalliques,
Cette pluie au moment des ardeurs idylliques,
Vous conviennent bien mieux que le beau temps passé.
L’été, c’est le bonheur, la joie et la lumière,
L’épanouissement sans crainte de l’esprit
A qui tout ici-bas et dans le ciel sourit.
L’été, c’est la jeunesse en sa verdeur première,
C’est la santé robuste et l’amour insensé…
Et moi, j’ai l’âme sombre et le cœur angoissé.
1868 dans son recueil Rayons perdus
Je suis Louisa Siefert, née en 1845 à Lyon, poétesse française souvent oubliée malgré un talent qui m’a valu une reconnaissance rapide. Très jeune, j’ai trouvé dans la poésie un refuge pour exprimer mes sentiments, mes doutes, et la mélancolie qui me traversait. Mon premier recueil, Rayons perdus, publié en 1868, a reçu un accueil chaleureux, et j’y explore des thèmes comme l’amour, la nature, et la tristesse de l’automne, avec des poèmes comme « Pluie d’automne ». J’ai toujours voulu que mes mots touchent le lecteur, qu’ils résonnent avec les émotions que l’on n’ose parfois pas exprimer. Bien que j’aie lutté avec des soucis de santé, j’ai continué à écrire, espérant que ma poésie survive au-delà de mon temps. Si mes vers sont empreints de mélancolie, ils témoignent aussi de ma quête de beauté et de compréhension des âmes sensibles.